Lourdes Ortiz : l'histoire au crible de la littérature

Écrivaine espagnole révélée par son premier roman Luz de la memoria en 1976,  Lourdes Ortiz (Madrid, 1943) fait partie de cette génération d’écrivains nés après la guerre civile et témoins du démantèlement du Franquisme, de la mise en place de la Transition et du rôle ambigu qu’y joua le Parti Communiste Espagnol.  Même si elle n’a pas toujours la place qu’elle mérite dans l’histoire littéraire de l’Espagne contemporaine, son œuvre tout entière offre un regard novateur, tantôt cynique, tantôt mélancolique, mais toujours perspicace, sur la réalité socio-politique et l’histoire récente espagnole. 

C’est cet angle d’attaque qu’a choisi d’adopter Claire Laffaille dans cette étude : à partir de différentes historiographies, d’ouvrages consacrés à l’écrivaine, d’archives privées, de commentaires et conversations privées, et surtout d’un roman inédit que lui confie l’auteure, elle entend passer ici au crible l’Histoire contemporaine de l’Espagne par le biais la production romanesque de Lourdes Ortiz et analyser ainsi la nature du positionnement idéologique de cette ancienne militante du Parti Communiste Espagnol face aux événements historiques qu’elle a vécus. Elle s’attache pour ce faire à l’étude de trois romans de l’écrivaine : Luz de memoria (1976), La fuente de la vida (1995) et Andrés, roman inédit rédigé entre 1969 et 1971 et jamais abordé jusqu’alors par la critique.

Par une étude minutieuse de l’environnement créatif de l’écrivaine tout autant que des procédés formels qu’elle adopte, Claire Laffaille démontre ainsi combien ces récits sont une invitation à remettre en question le discours dominant et par là-même à actualiser la connaissance de cette écrivaine engagée, dont la critique politique lucide et clairvoyante présente tout au fil de son œuvre propose un autre regard sur les enjeux de l’Histoire contemporaine et cherche à réhabiliter la mémoire des vaincus de la future Transition, à en faire émerger les vérités cachées.